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cinequanon

MODIANO : Dans le café de la jeunesse perdue

21 Décembre 2013 , Rédigé par pasc

PATRICK MODIANO : Dans le café de la jeunesse perdue

 

 

Avec un titre aussi mystérieux que celui de son premier roman : Rue des boutiques obscures, Patrick Modiano nous offre Dans le café de la jeunesse perdue, un roman choral, d’une douceur et d’une âpreté infinies.

Nous errons avec lui dans les rues du Paris des années 60, carambars et scoubidous…un Paris dans lequel il est facile de brouiller les pistes et dans lequel nous partons à la recherche de Jacqueline Delanque, dite Louki.

On la retrouve, grâce à un détective privé, dans un café aujourd’hui disparu : « Le Condé » où se côtoient des intellectuels à la dérive.

Puis Louki elle-même nous livre une partie de son adolescence en solitaire, son goût pour la nuit, son goût pour la fugue. Elle laisse sa trace dans les mains courantes d’un commissariat du 14ème arrondissement pour « vagabondage de mineure » dans le quartier Clichy, vers la Place Blanche. Elle lit « Horizons perdus » pour trouver un sens à sa vie et elle fugue une dernière fois, peu après son mariage.

La dernière voix du roman est celle de son amant Roland, il évoque leurs errances dans les métros, sur les boulevards, de bars en bars…

Nous détenons alors les pièces d’un puzzle formé d’êtres qui se sont tus, sans jamais pouvoir reconstituer leur ultime vérité.

Patrick Modiano a un pouvoir hypnotique sur son lecteur.

Il sait lui faire suivre un labyrinthe dont le fil d’Ariane est extrêmement ténu et tente à chacun de ses romans - y parvient-il ?- de capter l’essence de silhouettes qu’il a croisées, fantômatiques ; d’êtres qui refusent de disparaître complètement.

Par son écriture rapide, précise et légère, il nous fait entrer dans un univers noir et blanc, redonne vie à des anonymes et confère aux années 60 une teinte ternie comme le ferait un polar sans crime et sans meurtrier.

Sa prose est diaphane, très visuelle et en même temps inssaisissable, ambiguë.

J’aime entrer avec lui dans un temps révolu, suivre ses pérégrinations dans les « zones neutres » dont il a le secret.

Il donne du relief à ce qui n’en a pas : un cahier à spirale, une banquette en moleskine rouge, un appartement sans meubles.

Tout semble réaliste et pourtant étrange. Plus il en dit et plus nos repères sont flottants.

 

Une écriture comme un oubli, comme une longue chute dans le vide, silencieuse.

 

 

 

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